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Violences conjugales : se mobiliser aussi pour les enfants

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FAMILLES EN SUSPENS. Valérie de Pauw, déléguée départementale aux droits des femmes et à l'égalité, appuie sur l'importance de la prise en charge des enfants exposés aux violences conjugales comme des victimes à part entière : une politique qu'elle impulse et met en actions tout au long de l'année, ponctuée par deux journées phare, le 8 mars et le 25 novembre.

Combien d’enfants sont exposés à des violences intrafamiliales en Dordogne ?

Les derniers chiffres du ministère indiquent que 143 000 enfants vivent dans un foyer où une femme a déclaré être victime de violences commises par son conjoint ou son ex-conjoint, qu’elles soient physiques ou sexuelles. 42 % de ces enfants ont moins de 6 ans. En 2022, 105 enfants sont devenus orphelins d’au moins un de ses parents suite à des homicides au sein du couple, et 31 étaient présents sur la scène de l’homicide.

Nous manquons de données au niveau départemental pour l’instant. Le plan national de lutte contre les violences faites aux enfants 2023 – 2027 prévoit d’améliorer les transmissions d’information entre les cellules de recueil et de traitement des informations préoccupantes (CRIP) et le 119. Ces travaux devront permettre de faciliter le traitement et le suivi des situations au niveau local.

Quelles conséquences ces violences ont-elles sur le développement de l’enfant ?

Les constats du gouvernement, appuyé en cela par l’Organisation mondiale de la santé, sont clairs : assister à des scènes de violences a des effets sur la santé des enfants… énurésie (“pipi au lit”), anxiété, syndrome de stress post-traumatique.

La conférence de Cyril Tarquinio au centre Joséphine Baker de Périgueux, à laquelle plus de 530 périgourdins ont assisté, a montré ces liens entre santé mentale et physique. Un éclairage qui prenait tout son sens le 25 novembre dernier, journée contre les violences faites aux femmes (lire plus bas).

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Le professeur de psychopathologie à l’université de Metz a mis en évidence les mécanismes de notre cerveau en cas d’événements adverses, quels qui soient : violences physiques ou verbales, négligences, séparation, isolement…

Ces événements adverses génèrent du stress, de la détresse ou encore de l’anxiété, qui, en cas de chronicité, a un impact sur le système immunitaire.

L’analyse rejoint celle de son livre au tire évocateur, Les Maladies ne tombent pas du ciel. Nous ne sommes pas juste des symptômes. Ces maladies s’inscrivent dans des histoires. J’en retiens également que les enfants qualifiés de co-victimes, quel que soit leur âge, ont 5 à 6 fois plus de risques d’être à nouveaux victimes durant leur vie d’adulte. Et de 4 à 12 fois plus de risques d’addiction. Les conséquences sur la santé sont graves et durables dans le temps.

Cette cause mobilise-t-elle les Périgordins ?

Du 10 au 18 octobre, 470 périgordins ont participé au Challenge sportif connecté pour améliorer les conditions de prise en charge des enfants victimes de violence. L’initiative, à laquelle j’ai été très vite associée, a été portée par Hélène Jabinet, conseillère de l’agence de Montpon du Crédit Agricole Charente-Périgord.

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Si ce n’était pas le premier projet de ce type qu’elle a pu coordonner, cette cause a mobilisé sept caisses locales du Crédit Agricole Charente-Périgord, avec le soutien de la Caisse Régionale de la banque, ainsi que le Centre hospitalier Vauclaire – Fondation Vallis Clara et les services de l’État de la Dordogne.

La cérémonie de remise de don, qui s’est tenue le 12 décembre au siège du Crédit Agricole, à Bergerac, a révélé l’ampleur de la mobilisation… 30 millions de pas, 24 609 km cumulés (l’équivalent de plus de 500 marathons), 1700 photos postées. 6100 euros ont été récoltés au profit des centres médico-psychologiques du Centre hospitalier de Vauclaire et de la future Maison des Femmes, qui devrait ouvrir ses portes à Périgueux au cours de ce premier semestre.

Quel rôle va jouer la Maison des Femmes dans l’accompagnement des co-victimes ?

Valérie de Pauw © SBT

La Maison des femmes est un dispositif national dédié à la prise en charge des femmes victimes de violences, dans un cadre hospitalier. La première a été fondée en 2016, en Seine-Saint-Denis. Elle a rapidement inspiré d’autres structures et professionnels. Dès 2017, un modèle proche est créé à Bruxelles, adossé au CHU Saint-Pierre (le 320 rue Haute), puis à Bordeaux (La Maison d’Ella), Brive-la-Gaillarde (La Maison de Soie), Reims… Il y en a actuellement une vingtaine, réunies dans le collectif ReStart, créé en mars 2021.

La Maison des Femmes de Périgueux, financée par l’Agence régionale de Santé, va permettre d’accueillir et d’informer toutes les femmes victimes de violences et les co-victimes du département, de proposer un premier accompagnement social et psychologique sur place et d’orienter les victimes vers les autres dispositifs du territoire en les soutenant dans leurs démarches.

La question de l’impact des violences sur les enfants fera l’objet de formation des acteurs du territoire selon un cahier des charges actualisé, note d’information de la Direction générale de l’offre de soin (DGOS) qui élargit les missions dévolues aux Maisons des Femmes. L’accès aux soins des personnes en situation de handicap et la prise en charge psychologique en lien avec les centres régionaux du psychotraumatisme seront ainsi de leur ressort. Cela permettra une prise en charge des situations les plus complexes.

* Mussidan-Villamblard, Périgueux, Périgord Blanc, Ribérac, Trélissac, Vélines et Villefranche-Montpon 

De l’enfant à l’adulte : réparations possibles

©Prefecture24

Dans le cadre de la Journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes, les services de l’État de la Dordogne et la délégation droit des femmes et à l’égalité ont proposé une conférence ouverte à tous animée par Cyril Tarquinio sur le thème « Existe-t-il un lien réel entre nos traumatismes d’enfants et les maladies que va déclencher notre corps ? »
Le professeur en psychologie de la santé et clinique, directeur d’une équipe de recherche sur l’évaluation de la prise en charge clinique, créateur et directeur du centre de formation Pierre Janet (seul centre en France de recherche sur les psychothérapies) dirige également six masters en psychologie clinique. Il est écrivain et conférencier.