L’auteur, journaliste auquel on doit — sous son vrai nom — des ouvrages consacrés à Lascaux et à ses grands témoins, tire une nouvelle fois les ficelles d’un polar sur fond des deux univers qu’il connait bien, la presse et la préhistoire. L’intrigue du premier roman, Du sang dans les grottes, se déroulait à Montignac et flirtait avec un trafic de drogue. Ce volume-ci navigue entre Les Eyzies et Le Bugue et mêle des secrets de la Résistance aux aspirations New Age sur fond de détournement de vénus callipyges.
Vénus hors d’âge et gourou New Age
Tout commence loin des bases locales avec un Périgourdin pittoresque, en affaires dans les coins sombres de Londres. Puis nous voilà en plein stage de chamanisme. Les cadavres vont commencer à tomber, sans que rien ne les relie de prime abord. L’ombre d’un RRRrrr!!! façon Chabat et d’un tueur en série se dessine. Le ras-de-marrée médiatique qui suit, comme dans le premier roman, met le Périgord noir à la Une, et l’ancien gendarme devenu correspondant de Sud Ouest, Christian Magnon, mobilise ses réseaux pour marquer des points (gendarme un jour gendarme toujours !… et journaliste un jour…) Le duo qu’il forme avec Stéphanie Sarlat se joue de ce qu’ils ont appris sur eux-mêmes en deux épisodes, et le cadre familial s’enrichit des joies de l’adolescence de Laurine. La petite bande s’anime sur le dos d’un capitaine Gonzalez suffisant qu’on aime voir mouché.
Expériences spirituelles et mercantilisme
D’ouverture de chakras en adeptes dévouées corps (surtout) et âme, on suit Kaperski le grand gourou dans un voyage, pas seulement astral, entre campement en peau de bête et petite tribu de thérapies alternative en 4X4 suréquipé et Tesla dernier cri, du côté de Plazac et la Côte de Jor. De fausses pistes qui se croisent et s’embrouillent en SMS complices, de fouilles clandestines en squelettes de la dernière guerre qui refont surface, du site de Commarque à une grotte secrète dans la falaise (celle des Antimémoires de Malraux ?), de suspect virant victime possible, l’auteur embarque le lecteur en saupoudrant d’humour plus d’une scène : formations de l’Aube de l’Humanité à Gorge d’Enfer, journalistes tiraillés entre siège des instances et course à l’info, tête de chapitre en contrepet et festival de titres de Une possibles. Le tout sur fond d’infos solides, sourcées à la Miviludes ou à l’OCBC ; oui, le trafic de biens patrimoniaux est la 3e source de profits illicites dans le monde après la drogue et les armes. Et on adore sa playlist, de Supertramp à Higelin en passant par Bowie, Nino Ferrer, Jean-Louis Aubert et Kate Bush.
Nuances d’Histoire(s)
Les autochtones s’amuseront encore des noms de lieux et de personnes, reconnaîtront quelques véritables acteurs de la vie locale sous des traits de fiction (un multi-propriétaire de sites de la vallée de Vézère, une conservatrice du musée national de Préhistoire, un prêtre dont on a du mal à oublier le visage dans les situations décrites, une Pauline qui pourrait réaliser des films sur la préhistoire, une Martine Castelnaud passionnée de surnaturel, Albert Bussière de DL, une procureure… sans oublier un journaliste à canotier inhumé aux Eyzies) et les touristes se régaleront tout autant de ce qui reste une expédition en terre inconnue, sur les rives de la Vézère. Dénouement sacrilège compris !