Tortueux, les troncs présentent les stigmates de l’usure du temps. Mais leurs nombreuses branches s’élèvent vigoureusement vers le ciel. Situées juste derrière la grange du château de La Guionie, ces deux petites rangées de charmes étaient l’endroit de prédilection de l’ancienne propriétaire, Madeleine Jarjavail, qu’elle appelait “Les Charmilles”, selon Christophe Dutrône.
Lorsqu’il acquiert, avec son épouse Valérie, cette propriété en janvier 2020 (après 17 ans d’abandon), cet assistant du patrimoine des Archives départementales se lance dans les recherches sur ce début d’allée majestueuse. Il trouve sa trace sur la plus ancienne carte du Périgord connue : celle de Belleyme (1785). « On y voit une grande allée d’arbres qui reliait La Guionie à la demeure voisine, La Coudercherie. La levée sur le terrain ayant été réalisée en 1761, il y a tout lieu de croire que les charmes qui la constituaient, suffisamment imposants pour attirer le regard de l’ingénieur géographe, avaient été plantés entre la fin du XVIIe et le début du XVIIIe siècle… », explique l’historien passionné.
C’est justement à cette époque que l’ancienne commanderie Templière passe aux mains des Siorac, qui lui ont donné sa forme générale actuelle. 300 ans… Une longévité exceptionnelle saluée par Georges Feterman, le président d’ A.R.B.R.E.S. « Pour les anciens, les vieux arbres devaient avoir une fonction utilitaire… Lorsqu’on découvre un endroit comme celui-là, c’est l’émotion qui nous saisit. » L’association née voilà 30 ans remettra de façon symbolique, en octobre prochain, le 1000e label de l’arbre remarquable, à Nantes. Sur ce millier de labellisations, environ 150 concernent les ensemble arborés remarquables, comme celui de La Guionie donc. Une belle mise en valeur qui pousse à la protection pour aujourd’hui… et pour demain.
De nouvelles plantations
Les propriétaires ont bien un projet : « Nous avons pris le parti de reconstituer cette allée retrouvée sur le cadastre napoléonien de 1838 sous la forme d’une croix ». Mobilisés pour le sauvetage des parties les plus menacées de la bâtisse, la restauration de la Chambre Jaune, puis du salon et ancien vestibule (travaux soutenus par la Fondation du Patrimoine), les 30 bénévoles ont été appelés à la rescousse.
La première tranche de plantations de 40 charmes a eu lieu à l’automne dernier. « Il ne suffit pas de les planter, alerte Christophe Dutrône. Il s’agit également de les protéger des chevreuils ou autres sangliers, puis de les arroser. » À raison de 3 000 litres d’eau par semaines en été, l’entretien demande un certain temps. Une deuxième tranche aura lieu cet hiver. La mobilisation se poursuit pour que cet ensemble de vieilles pierres et d’arbres majestueux continue sa traversée du temps. Et si c’était ça le trésor de La Guionie ?
Emma LASSORT
Journées du Patrimoine 2024 : plusieurs formules de visite guidée du château
Le château de la Guionie date dans son ensemble du XVIIe siècle. Il a été édifié sur les bases d’une commanderie templière remontant au XIIe siècle, dont subsistent les caves monolithes.
Réservation obligatoire : dutronechristophe@yahoo.fr, 06 60 80 67 28 – Parking gratuit face à l’église de Lempzours ou à côté du cimetière.