
Au château de Bourdeilles, on saute déjà dans le temps en quelques mètres, de l’austère forteresse du Moyen Âge à l’élégant logis Renaissance. L’intrusion d’artistes contemporain dans les grandes salles médiévales propose actuellement un autre saut spatiotemporel. Cet événement inédit dans ce lieu a été baptisé “La ruée vers l’art”. Promu par une affiche dynamique de Jérémie d’Angelo, il est organisé par l’association périgourdine Carpe Diem et accueilli par la Semitour, gestionnaire de ce château du Périgord vert. Il s’est installé ici le temps de l’événement d’ouverture de saison touristique, Châteaux en fête, jusqu’au 9 mai.
Une étoile de plus

Le visiteur a ainsi l’embarras du choix entre la visite classique patrimoniale en suivant les panneaux, l’audioguide ou son Guide vert préféré qui vient de lui accorder une étoile supplémentaire. Durant les vacances scolaires, les animations se multiplient : ateliers de calligraphie pour écrire son nom en belles lettres ou d’héraldique avec Emilie Duthieuw pour créer son blason, arbalète en extérieur lorsqu’il ne pleut pas, démonstration d’escrime et visites nocturnes, conférences sur le Prince noir… Comme l’explique la responsable des lieux, Katia Hamadi, « ces activités ajoutent de la valeur aux visites avec de belles expériences ». Les souvenirs sont beaucoup plus beaux avec ces moments qui font résonner autrement les vieilles pierres.
Personnes de bistrots ou super-héros

Dans les deux grandes salles qui accueillent les œuvres contemporaines, chaque jour des artistes se relaient pour en parler au public. « L’association a réuni des créateurs déjà bien connus ou que l’on découvre ici », souligne Bernard Boudin, peintre et organisateur chaque année, en octobre, de Sanilh’art, la plus grande foire aux artistes du Périgord.
On reste scotché par les “Naguérotypes” du Ribéracois Marc Coutureau qui détourne des photos anciennes de personnages de bistrots. Les collages de la fantasque Mac Marik revisitent les super héros, les portraits d’enfance d’Arno Loth font découvrir une inspiration plus tendre que de coutume, les travaux de matière de Christophe Ossard inventent des couleurs…
L’art en scène

Francis Ringenbach, sorti de Lascaux, n’a pas fini de s’inspirer des minéraux des parois des grottes, les sculptures de verre de la japonaise de Belvès Youki Yamaguchi Mouquet s’amusent dans la lumière, les pastels de Juliette Duretête-Brodel étonnent toujours et les graphes de Crazy One sont sagement posés sur de petits tableaux. Sur deux étages cette exposition collective a trouvé sa place pour réveiller les vieilles pierres de Bourdeilles.
Le créateur et animateur de Carpe Diem, Jean-Luc Laville, a ainsi réussi à nouveau un joli coup, après le hold-up dans l’ancienne Banque de France de Périgueux en septembre et en attendant celui prévu dans la cathédrale Saint-Front lors des prochaines journées du patrimoine. « C’est notre état d’esprit. Nous proposons de profiter du moment présent en faisant bouger les gens dans différents lieux », explique ce Périgourdin qui fait bouger la culture depuis vingt ans. Il a déjà d’autres projets en vue.
Un château à redécouvrir

Vu comme décors dans plusieurs films ou téléfilms (Cartouche, Richelieu), Bourdeilles est réputé pour son donjon vertigineux qui domine la Dronne et pour sa collection de meubles et de sculptures du logis Renaissance. Historiquement, il est le fief de l’une des quatre baronnies du Périgord. Son extension Renaissance a été construite par Jacquette de Montbron, l’une des rares femmes architectes du XVIe siècle, proche de Catherine de Médicis et belle-sœur du fameux Pierre de Bourdeilles dit Brantôme, l’auteur des écrits coquins “Les femmes galantes”.

Bref, Bourdeilles est l’un des passages obligés en Périgord vert, pour sa vue, ses collections et ses animations nombreuses au fil de l’année, dont un escape game bien rodé.