Outre les problématiques de désertification médicale et d’éloignement géographique des salariés, prises en compte dans son analyse, des études de l’INSEE montrent régulièrement les inégalités marquées en termes de différence de vie en bonne santé selon les métiers exercés. De quoi nourrir une réflexion articulant avec les différentes spécialités et compétences, la santé au travail, la santé publique, et environnementale ; pour Laurent Eecke « un vrai combat citoyen pour réduire les inégalités ».
Renouer le lien entre médecine du travail et médecine de ville
Un premier axe consiste à s’appuyer sur l’existence de maisons de santé pluridisciplinaires sur notre territoire afin de mettre en place des consultations avancées, en lien avec la CPAM, le Conseil départemental et l’ARS. Une approche « pour décloisonner le médecin du travail, en l’intégrant avec d’autres spécialistes, pour une prise en charge globale, dans un même lieu, au même moment, en favorisant les échanges ». Cette démarche se fait déjà dans une quinzaine de maisons pluridisciplinaires périgourdines, permettant aux salariés de ne pas être trop éloignés du médecin du travail, et ce dernier pas trop éloigné de l’entreprise. En cas d’absence de ce type de structure pluridisciplinaire, il est fait appel à la télémédecine.
Maintenir une consultation de qualité.
Le second axe déjà expérimenté depuis près d’un an par le SST24 est l’unité mobile connectée et aménagée, une première en France, testée et saluée par le secrétaire d’État chargé des retraites et de la Santé au travail, Laurent Pietraszewski, lors de sa visite en avril 2021. (Lire article)
Pensée pour couvrir des zones blanches ne disposant pas de centre annexe ou de maison de santé pluridisciplinaire, elle constitue une réelle alternative dans un département aussi étendu. Une méthode supplémentaire rendue possible par la médiation d’une infirmière accueillant le salarié, et disposant de tous les outils médicaux connectés dans le véhicule, le médecin recevant à distance les résultats.
Complété par la téléconsultation, ce dispositif récemment évalué, montre « une qualité de service rendu supérieure, à coût égal ». Représentant en moyenne une consultation sur dix, il permet aux salariés, dans le cadre de téléconsultations, de pallier des difficultés rédhibitoires pour la réalisation de la consultation (personne en situation de handicap, absence de permis de conduire ou de véhicule).
Médecin du travail, une spécialité en mutation
Si ce professionnel a longtemps travaillé seul, il retrouve depuis la loi de 2016 (portant la réforme de la médecine du travail et des services de santé au travail) une connexion avec les autres disciplines, en concordance avec les plans de santé publique et plans de santé environnement. En outre, son rôle est renforcé et lui permet de décider de la date à laquelle il revoit le salarié ; il peut être également sollicité à la demande de ce dernier. Des changements importants, susceptibles d’attirer davantage des étudiants en médecine peu séduits par cette spécialité.
Face aux enjeux d’une bonne santé dans l’entreprise, inséparable des autres déterminants de santé, la médecine du travail montre qu’elle est non seulement moderne par son recours régulier à la télémédecine, mais que sa vocation de prévention des risques professionnels est enfin valorisée, permettant à Laurent Eecke de conclure que « si elle ne sauve pas des vies, elle est la médecine de la maturité car l’on sait bien aujourd’hui que prévenir coûte moins cher que guérir. »
Un service précurseur : tests et expérimentations
Dans la continuité du recours aux nouvelles technologies, le SST 24 a reçu des équipes du Centre National d’Études Spatiales (CNES) pour réaliser des tests satellitaires ; les satellites, constituant des palliatifs à l’absence de 4G, peuvent s’avérer utiles dans les zones blanches périgourdines. Les objectifs à moyen et long termes du CNES seraient de développer des prototypes d’unités itinérantes plus légères et plus mobiles.
Toujours dans l’expérimentation de nouveaux outils et dans le cadre d’une convention, les médecins de l’AIST 19, à Tulle et à Brive, ont testé l’une des deux télécabines entièrement équipées et connectées, installées en France par le ministère de l’Intérieur (la seconde se trouve à Calais) à destination de ses agents. À l’issue de ce test, ce type de télécabine extrêmement sophistiqué pourrait avoir son utilité dans des secteurs plus isolés, même s’il parait aux deux professionnels un peu démesuré pour de la médecine de prévention.