Mais où sont donc passées les Plumes de Léon en 2024 ? Le festival littéraire de la vallée de la Vézère s’est fait très discret cette année. En juin, les habitués n’ont pas retrouvé, comme les années précédentes, ces belles journées de rencontres gratuites entre auteurs et publics pour partager le bonheur d’écrire et de lire. Le festival a pourtant connu cinq belles éditions depuis sa création en 2019, avec Maylis de Kerangal comme invitée d’honneur, et l’accueil d’une foule d’écrivains depuis.
La créatrice de ces rendez-vous, Béatrice Ottersbach, le déplore : « l’argent reste le nerf de la guerre, je n’ai pas trouvé les moyens pour financer le budget de cette année ». Les collectivités qui ont restreint leurs subventions et les fondations prises d’assaut par les festivals l’ont contrainte à réduire la voilure en annulant la partie festivalière à l’approche de l’été. Avis aux mécènes.
« Dommage, c’était une fête et on devait même parfois refuser du monde. Malgré les aides, l’accueil des restaurateurs pour les soirées littéraires et le bénévolat, il faut bien financer le déplacement des auteurs et les frais, soupire l’organisatrice. Se mettre en pause cette année a été très douloureux. » Elle n’a pas voulu compromettre le reste du programme annuel, qui continue avec ses rendez-vous ponctuels.
Les Plumes de Léon ont trouvé depuis cinq ans leur place pour irriguer la vallée de la Vézère de courants littéraires.
Professionnelle de l’édition franco-allemande, scout littéraire qui repère des auteurs francophones pour des éditeurs germaniques, Béatrice Ottersbach a fait des Plumes de Léon une raison de vivre. « J’y passe énormément de temps, mais on a beau me dire que c’est un super boulot, sans moyen on ne peut pas suivre. »
Des cocons pour écrire
Heureusement, la programmation annuelle continue, avec ses soirées littéraires gourmandes organisées dans des restaurants locaux avec des auteurs enthousiastes. Début novembre, c’était autour de Yan Lespoux et de son roman Pour mourir, le monde que le rendez-vous était donné au restaurant de la Poste de Saint-Léon grâce à ses propriétaires Myriam et Christophe Manouvrier. La participation du public au repas finance l’opération. Les années précédentes, il y avait eu Marie-Hélène Lafon, Véronique Ovaldé, Marie Nimier… Ces moments forts de partage avec le public, comme ceux qui ont lieu dans les médiathèques des environs et dans les lycées, rassurent Béatrice Ottersbach : « on ne peut pas baisser les bras, il faut continuer ».
Les résidences d’écriture, la partie la plus discrète et la plus professionnelle des Plumes ne s’est pas arrêtée. Elle se poursuit même avec vigueur. Dans ses deux gîtes de Saint-Léon, Béatrice Ottersbach accueille des auteurs une bonne partie de l’année. Dans ces cocons aménagés dans les bâtiments de l’ancienne ferme de son grand-père, ils se retrouvent au calme pour préparer leurs prochains livres.
Les auteurs s’installent dans ces maisons pleines de charme et de livres pour des séjours studieux, financés par des bourses. Le but est de leur permettent de changer d’air pour avancer dans leurs projets. Ils bénéficient de l’espace privilégié d’un village touristique très calme hors saison, tout en partageant leur savoir-faire littéraire avec tous les publics et notamment des lycéens.
Des Indochinois en Périgord
Dernièrement l’une des maisonnettes aux volets bleus était occupée par le journaliste et historien Pierre Daum. Il travaille sur l’histoire des travailleurs indochinois en Périgord, envoyés de force durant la Seconde Guerre mondiale à la poudrerie de Bergerac ou pour assécher des marais près des Eyzies. Il reviendra en début d’année pour continuer à intervenir au lycée Saint-Exupéry de Terrasson, mais aussi à Maine de Biran à Bergerac et Laure Gatet à Périgueux. Au cours de l’année 2025, une passionnante exposition présentée aux Eyzies, puis à Bergerac, lors de la sortie de son nouveau livre donnera un grand coup de projecteur à cette histoire coloniale, peu connue des Périgordins, dont il est le spécialiste incontesté.
Violaine Bérot, sera en résidence du 25 novembre au 13 décembre. L’autrice ariégeoise, ingénieure en informatique et adepte de la vie au grand air, sera concentrée sur ce qui deviendra peut-être son 14e livre. Elle reviendra aussi en mars pour poursuivre ses réflexions avec les lycéens de Terrasson.
Comme chaque année dans le cadre de la coopération entre la Nouvelle-Aquitaine et le Land de Hesse, il y aura également une autrice allemande. Cette année Saint-Léon accueillera Rike Bolte, poétesse polyglotte qui travaille sur une histoire qui se déroule en Colombie. Dépaysement garanti en Vallée de la Vézère.