Le choix de Nabucco pour 2025 a mis en avant le rôle des choristes dans cette œuvre de Verdi. On y trouve l’un des plus célèbres airs d’opéra, le ”Chœur des esclaves” aussi appelé ”Va pensiero”, devenu un véritable tube du lyrique, un chant revendicatif ou un refrain très utilisé par les publicitaires. Tout le monde l’a dans la tête. La cheffe Chloé Meyzie a mis la barre haut avec ce titre exigeant en italien, représentant pour l’ensemble vocal plus de 45 minutes de chant soutenu.
Dans cet opéra collaboratif, la grande majorité des intervenants sont des amateurs passionnés, aux côtés d’une poignée de professionnels, pour monter une œuvre de qualité accessible à tous les publics. Les 70 choristes travaillent depuis l’automne pour apprendre les textes phonétiquement et poser leurs voix. Le challenge a rebuté certains participants des premières éditions, mais en enthousiasme toujours d’autres. Cécile, qui avait été volontaire dès Carmen, a découvert l’univers du chant lyrique et ne peut plus s’en passer. Cette enseignante qui s’est mise au chant pour l’occasion y a trouvé du bonheur : « Ça m’apaise et ça me soulage ». Elle y a noué des liens dans l’équipe et trouve « l’ambiance géniale ».
La bienveillance des professionnels

Le mot qui revient chez la plupart des participants est celui de bienveillance. Ils apprécient la patience et la pédagogie du chef de chœur Jean-François Bulart qui fait partie du chœur de l’Opéra de Limoges, après être passé par celui de Bruxelles. La créatrice du Labopéra Périgord Chloé Meyzie fait l’unanimité pour son écoute. Et ce n’est pourtant pas facile lors des répétitions dans des locaux souvent peu chauffés et avec une sonorité improbable. Personne n’oublie le pianiste accompagnateur, Jean-Baptiste Cougoul, qui a fait répéter patiemment avec son petit clavier.
Beaucoup de choristes pratiquaient déjà le chant dans des ensembles vocaux locaux. Ainsi Martine, une enseignante retraitée, était active dans Tourne-Sol à Chancelade avec son mari Christian. « Chaque année nous retrouvons un bonheur énorme au Labopéra, surtout quand nous chantons avec l’orchestre après des mois de répétitions et que l’on rencontre les solistes. » Ils travaillent tous les jours et goûtent le plaisir « de participer à une expérience hors du commun ». Ils n’étaient pourtant pas familiers de l’opéra.
À 35 ans, Célian, dessinateur animateur à Angoulême, apprécie le chant lyrique. Il se lance dans l’aventure pour la première fois. « C’est un super projet à vivre avec des professionnels », dont il loue lui aussi la bienveillance.
Un partage d’expérience
La formule de l’opéra collaboratif est très appréciée pour le partage d’expérience qu’elle apporte aux amateurs. Le long travail de répétition en italien a été trouvé moins difficile par Pascal que celui de West side story l’an dernier en anglais. « La bonne idée d’avoir mis des récitatifs en français aide bien à la compréhension. » Il souligne lui aussi la bonne ambiance et le groupe amical que constitue le chœur. Manu, infirmier qui jouait de la guitare rock, s’est lancé avec passion dans Nabucco après avoir joué dans la comédie musicale de Bernstein l’an dernier. « On apprend énormément avec cette expérience, c’est très gratifiant. »

Dominique, un ancien fonctionnaire, ou Richard qui était comédien, apprécient la nouvelle dimension que le chœur leur apporte. Mauve, cheffe cuisinière, apprécie ce travail, notamment avec l’orchestre et les solistes. Bruno, enseignant retraité et membre de l’ensemble vocal de Périgueux, n’avait pas osé venir à la première édition, mais se régale depuis chaque année en passant « des moments extraordinaires ». Pas facile pourtant d’apprendre phonétiquement les paroles et d’y consacrer beaucoup de temps. Catherine, ex-professeure de langues, qui vient de l’ensemble vocal Résonances, apprécie dans cette expérience l’amélioration de ses connaissances musicales.
Le Labopéra n’est pas une histoire artistique élitiste, c’est tout une aventure humaine qui rapproche beaucoup de monde bien avant le moment des concerts.
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Des mois de travail pour trois concerts
Le Labopéra a sa qualité professionnelle apportée par ceux qui encadrent, notamment la metteuse en scène Gersende Michel, impliquée depuis l’origine aux côtés de Chloé Meyzie, ainsi que les solistes qui apportent leur métier et leurs expériences. Au cours des préparatifs, ils sont intervenus dans des établissements scolaires, ainsi que dans un Ehpad en partenariat avec France Alzheimer.

Les choristes ne tarissent pas d’éloge pour Irina Stopina qui a eu la révélation du chant à l’âge de 27 ans et incarne Abigaïlle, la fille de Nabucco joué par Jiwon Song. Olivier Montmory, Ismaël, a fait plusieurs métiers avant de passer au lyrique, Charlotte Broker la franco-anglaise chante le rôle d’Anna, Ahlima Mhamdi est dans celui de Fenena et Jérémie Brocard est Zaccaria, Adrien Djouadou le grand prêtre qui fut guitariste autrefois, et Francis Etosi intégré avec les professionnels pour jouer Abdallo.
Chloé Meyzie, la patronne du Labopéra, n’a jamais caché que les recrutements des solistes professionnels se font autant pour leur talent que pour leurs qualités humaines et relationnelles. C’est la moindre des choses pour un opéra collaboratif.
Pour le public, le rendez-vous est fixé pour la première samedi 4 avril à 20 heures et pour la dimanche 5 avril à 16 heures que l’on nomme “matinée” dans le jargon du spectacle. Auparavant, il y aura eu une générale vendredi soir, devant une salle remplie de collégiens, de lycéens et d’apprentis des établissements qui ont collaboré au Labopéra.
Pour les deux représentations publiques, les réservations (prix des places de 20 à 50 euros) sont ouvertes sur les sites en ligne du Palio, de Ticket Master, de la Fnac et de Carrefour, dans les espaces culturels Leclerc, au magasin Auchan. On peut aussi appeler directement à l’Arena Palio de Boulazac le lundi de 9 heures à 12 heures et de 13 h 30 à 17 heures. Le mardi, jeudi et vendredi de 9 heures à 12 heures seulement.