Après l’obtention de son BTS « Service en Espace Rural », Julien a réalisé qu’il ne souhaitait pas travailler dans un bureau. Il s’est donc orienté vers un métier manuel et, après avoir testé différents matériaux et techniques (notamment à l’Ecocentre du Périgord), il a opté pour le bois. Il est d’abord devenu charpentier avant d’élargir ses compétences à l’accompagnement d’autoconstructeurs et aux chantiers en écoconstruction. Il a provisoirement arrêté son activité professionnelle, il y a deux ans, pour se consacrer à son projet d’habitat en paille sur la commune de Jaure.
« Mon père est agriculteur. J’ai passé mon enfance à la campagne et ma prise de conscience politique vient peut-être de son engagement dans la Confédération paysanne. En plus d’avoir développé un fort rapport à la nature, cela m’a fait me questionner sur les alternatives possibles à un mode de vie classique. D’autres rencontres m’ont sensibilisé au patrimoine bâti ancien. Notre maison est un projet mûrement réfléchi avec Agathe, ma compagne, qui s’inscrit dans le prolongement d’une recherche de cohérence dans notre vie et pour celle de nos enfants, dans le respect du vivant. »
Le terrain, assez vaste, accueille déjà un jardin ainsi qu’un magnifique atelier bois conçu par Julien : « il me sert déjà pour la construction de la maison et sera idéal, plus tard, lorsque je reprendrai mon activité professionnelle. Et si un jour nous choisissons de vivre ailleurs, toutes les gaines et raccords sont prévus pour le transformer en maison d’appoint. »
Choix de cœur et de vie
L’autoconstruction de la maison ne sera pas totale : le terrassement et les fondations ont été réalisés par un professionnel, la confection des menuiseries sera assurée par un artisan local. Mais l’autofinancement de ce projet implique un investissement très important dans les autres postes, une tendance certaine au troc et à la récupération, et beaucoup de patience jusqu’à son aboutissement.
Julien y ajoute une dimension supplémentaire : « Plus que l’aspect financier, c’est l’affect qui me guide. Je souhaitais ramener une part d’enfance dans notre maison. Pour réaliser la charpente que j’ai voulue apparente, j’ai donc sélectionné les arbres dans les bois appartenant à mes parents où je construisais des cabanes pour jouer, enfant. Les bottes de paille proviennent des champs de mon cousin et la terre (pour les enduits) est extraite de la propriété d’un ami. » Le choix de la paille, en plus de ses nombreuses qualités, rejoint cette volonté : « je préfère utiliser un matériau qui me permet de bâtir avec mes copains plutôt que d’en utiliser d’autres plus manufacturés, utilisables seul. Le choix de l’ensemble des matériaux est fait pour que, lorsque la maison aura vécu sa vie, elle retourne à la terre en générant un minimum de déchets non recyclables. »
Savoir-être et savoir-faire
La quête de cohérence de Julien se traduit aussi par sa volonté de découvrir et de mettre en pratique de nouveaux savoir-faire. Il s’intéresse actuellement à la technique japonaise (nommée yakisugi) pour le bardage : traité au feu pendant quelques minutes, puis lavé et légèrement brossé afin de nettoyer la couche carbonisée, le bois présente ainsi un aspect sombre similaire aux bois anciens des granges environnantes. Cela rejoint l’envie de Julien de fondre au mieux leur maison dans le hameau d’un point de vue esthétique notamment. Ce traitement écologique confère aussi au bardage une stabilité d’aspect et une grande longévité puisqu’on parle de 80 ans « et moi, je n’aime pas refaire les choses comme lasurer des bois tous les cinq ou dix ans, par exemple ! » Julien s’est par ailleurs inscrit à une session pour apprendre à construire ses futurs panneaux solaires thermiques.
Ce projet va bien au-delà d’une simple construction : c’est une philosophie de vie, un engagement écologique et social avec un grand désir d’ouverture, de rencontres, de partage et d’amitié.
Marylin Bernet et Myriam Poupard
À suivre, le témoignage de Myriam
Caractéristiques de sa maison
Superficie de 114 m² pour 4 personnes.
Charpente en chêne et châtaignier.
Plafond en caissons de 25 cm de profondeur remplis de ouate de cellulose insufflée.
Dalle en chaux.
Murs en paille avec structure poteaux-poutres.
Enduits terre extérieurs et intérieurs, panneaux en fibre de bois sur certains murs.
Bardage en mélèze pour le mur nord et une partie des murs est et ouest.
Cloisons séparatrices terre et paille, isolation de certains murs en laine de bois.
Phyto-épuration et toilettes sèches.
Chauffage au bois.