Art décoratif, aménagement intérieur et menuiserie fusionnent dans l’univers de Christophe Arnswald : il conçoit et matérialise des univers hors normes pour professionnels et particuliers. L’atelier qu’il a aménagé au plus profond d’un parking de 250 m2 à Trélissac, patiemment vidé de tout ce qu’il contenait, est idéal pour lâcher la bride. Darkness Factory : le nom a jailli de la rencontre entre ce lieu et son activité. Cette sorte de grotte à température constante s’organise avec des coins dédiés à chaque pratique, cabine de peinture et vernis avec air pulsé, menuiserie, métal, digital… Ici, Christophe Arnswald goûte un maximum d’autonomie pour ses aménagements et ses œuvres, il vient même la nuit quand une idée le taraude puisque c’est tout près de chez lui.
Atelier ouvert et décalé
« J’essaie de maîtriser tous les matériaux que j’utilise. » Avec un attachement particulier pour le bois, formation d’ébénisterie auprès des Compagnons du Devoir oblige. Ils lui ont appris la rigueur, la valorisation du travail manuel traditionnel et les qualités esthétiques, dans une progression qu’il résume en « force, beauté, sagesse ». « J’ai eu l’opportunité de reprendre une entreprise aussitôt après mon apprentissage, à 21 ans, je ne suis donc pas parti sur un Tour de France. »
Sa société d’aménagement intérieur dans le sud de la France a prospéré. « Certaines cuisines que nous installions valaient le prix d’une maison. » Elle a réalisé des stands pour des clients d’exception (Paco Rabanne, etc.) sur des salons de la Côte d’Azur, et peu à peu « j’ai innové moins que je le souhaitais, il fallait enchaîner les chantiers, gérer l’équipe ». L’indépendance lui tient désormais à cœur.
Un travail en profondeur
Avec Darkness Factory, le créateur s’offre le luxe de travailler en solo et sans limites, pour « rendre les choses uniques et belles : on peut trouver des solutions à tout en offrant une seconde vie à des matériaux qu’on me donne parfois — j’ai ainsi récupéré une poutre du château de Hautefort —, en les détournant pour arriver à un résultat chic et pas cher. Le résultat visuel fait oublier qu’on n’a pas utilisé du marbre mais du bois. »
Béton, acier, peinture, résine époxy, sont au menu de sa curiosité et il expérimente des produits avec des partenaires comme Renaulac à Boulazac, qui a proposé une formation époxy dans l’atelier avec un intervenant venu d’Alsace pour un public d’une vingtaine de stagiaires de toute la France. Il s’est aussi rapproché du maroquinier Quentin Sallat, à Périgueux. « J’ai toujours eu envie d’être autonome sur de nombreux matériaux et de les combiner. L’idée, c’est de les adapter à l’attente du client et non l’inverse. Ma satisfaction c’est quand il trouve que c’est plus beau que ce qu’il imaginait. »
Laboratoire d’idées
La clientèle se répartit entre particuliers et professionnels, ces derniers offrant une vitrine publique au travail de Darkness Factory, comme Le petit caviste, qui dispose de magasins dans différentes villes, ou le Watson Pub à Périgueux, avec un mur décor de cinéma (bois travaillé pour un aspect métal façon Eiffel) qui arrête les regards. « Une grosse pression à chaque fois, car j’ai carte blanche et l’attente est grande. » Autant de prouesses visuelles mises en valeur sur Instagram, avec des partages sur les réseaux et demandes d’information.
Cabinet médical, open space, tous les usages sont à la portée de sa créativité, avec une affection particulière pour les répliques de décors de cinéma, des concepts pour des bars ou restaurant notamment. Parmi les demandes originales : un lit bateau-pirate commandé par une maman pour son garçon, avec des cordages, des poulies, des lampes… «L’objectif est de toujours rester dans l’univers du client, avec mon empreinte un peu rock, un peu underground. J’ai évolué du gothique vers un côté plus glamour, et ça continue… Ma spécialité est repérée et on vient vers moi avec des idées hors du commun, des chantiers vraiment hors normes. » Il vient de livrer l’aménagement d’un atelier de perruques, à la fois adapté à son confort de travail et agréable à l’œil du visiteur.
Partenaires locaux
Il a agencé une cave à vin pour un ex-commercial du Bergeracois, en intégrant une représentation du château de Monbazillac. Une fois précédente, il avait gravé des fleurs de lys sur les portes et sur les verres d’une cave conçue en nid d’abeille, travail de la lumière inclus car il associe l’éclairage pour mettre en valeur les reliefs. « Je travaille la lumière comme un matériau à part entière en intégrant des changements de couleurs par télécommande : comme artiste, je sais que c’est essentiel pour valoriser les reliefs. » Chaque réalisation est livrée avec certificat d’authenticité.
Difficile de chiffrer le travail à la mesure du temps passé, la conception entrant largement dans sa dimension exceptionnelle. Malgré l’augmentation du prix des matières premières qui pèse sur son travail, il s’attache à choisir des prestataires locaux, comme Périgord bois (Champcevinel) ou Delcourt (Javerlhac) pour le cuir.
Discret et sans limites
Pour ses créations plus personnelles, Christophe Arnswald est passé au travail sur palette graphique : il transforme ses conceptions digitales en connectant son graveur laser pour les sortir sur des supports bois, verre, métal, liège, plastique, cuir… « tout ce qui me tombe sous la main pour personnaliser chaque commande » ; processus inverse des dessins qu’il réalisait pour les numériser. « Mais je continue à dessiner à la main, parce qu’il n’y a aucune limite. » C’est dit : l’artisan d’art ne s’impose aucune limite et répond positivement aux demandes les plus incroyables, charge à lui de trouver les pistes techniques pour gagner le pari. « Je souhaite faire entrer la décoration artistique à domicile ou en entreprise : il n’y a pas de lieu tabou pour se présenter, c’est ainsi que j’avais exposé mon travail dans une galerie commerciale, pour montrer qu’il est accessible à tous. » Et on le retrouve sur la Route des Métiers d’art de Dordogne.
Famille d’artistes
Issu d’une famille d’artistes, père et frère peintres (père entomologiste, en plus, « et je suis devenu avec lui une encyclopédie de savoirs qui ne servent à rien, comme reconnaître de loin un papillon à son vol, et savoir si c’est un mâle ou une femelle » ; son père a ainsi répertorié durant dix ans l’ensemble du territoire corse et a légué sa collection au muséum de Bordeaux), Christophe Arnswald cultive cette fibre depuis l’enfance et aimerait créer un collectif d’artistes pour exposer un jour des œuvres hors du commun dans l’antre de sa Darkness Factory. Mais avant de montrer toutes ses facettes créatives, il fait porter ses efforts sur la stabilisation de son affaire. Et il va s’engouffrer dans un projet qui va l’occuper cet hiver pour transformer un lieu périgourdin réputé qui change de destination… à suivre !