Marie-Lise Marsat, maire du Buisson-de-Cadouin et vice-présidente du Département, ne cache pas sa joie de voir la préfiguration de la grotte de Cussac, joyau de la gravure, enfin ouverte dans sa commune, 24 ans quasiment jour pour jour après sa découverte par le spéléologue Marc Delluc. La convention qu’elle a signée en novembre 2023 avec le préfet de Région et Germinal Peiro pour valoriser ce chef-d’œuvre — dont le public ne verra jamais la version originale en raison des difficultés d’accès et de conservation —, prévoyait que l’État, en partie propriétaire du site, mette à disposition les éléments nécessaires à la conception de cette exposition et autorise la copie des œuvres.
Ainsi se concrétise cet outil de médiation longuement mûri, à deux pas du cinéma qui porte le nom d’un autre Delluc — Louis, cinéaste originaire de Cadouin —, point d’attraction avec lequel il fonctionnera en cohérence. Ce projet de territoire allie traces d’un lointain passé et vision d’avenir pour une ruralité vivante : avec l’abbaye de Cadouin et le proche Cepa, les grottes de Maxange, l’attrait de la rivière et des chemins de randonnées, l’offre locale est à la diversité.
Valorisation de richesses enfouies
Le président du Département salue la mémoire de l’inventeur, disparu en 2017, un homme discret (il n’a pas voulu que le site porte son nom) et prévoyant : comprenant la dimension exceptionnelle de Cussac, Marc Delluc a aussitôt envisagé les mesures de protection nécessaires pour réserver la grotte aux chercheurs… exception faite pour Germinal Peiro, qui a visité en janvier 2017 « cette œuvre majestueuse, comme un spéléologue, avec l’incroyable impression de la proche présence de ces hommes d’il y a 30 000 ans ».
Pour que le grand public, les habitants, les scolaires, les touristes, puissent s’approprier cette part de notre histoire, le Département a lancé la démarche de restitution, travail de longue haleine accéléré avec l’arrivée de la nouvelle Drac, Maylis Descazeaux. La première partie, inaugurée ce 4 octobre, représente un investissement de 800 000 euros pour le Département pour l’achat du local, la conception, la réalisation et la maintenance. « D’autres idées suivront, sur un terrain voisin acquis pour une construction de 1300 m2 sur deux étages », de quoi développer le fac-similé au-delà des deux panneaux actuels (celui de la Découverte et l’une des sépultures, à l’échelle 1), réalisés par l’Atelier des fac-similés du Périgord, à Montignac. Il est aussi question d’un lien avec l’art contemporain, avec un circuit thématique déployé dans l’espace public environnant. « L’art nous enrichit, c’est aussi une activité économique », conclut le président d’un département qui accueille six millions de visiteurs.
Protéger et transmettre
Le préfet se félicite que l’État et le Département unissent leurs efforts pour donner à voir ce site remarquable tout en le protégeant. « Il garde une part de mystère, à la hauteur de l’intensité qu’il procure », sur 1,8 km de long. Dès 2002, le ministère de la Culture a classé au titre des Monuments historiques la grotte découverte le 30 septembre 2000. L’État a investi plus de 3 M€ au fil du temps pour assumer les missions de financement de la recherche et de conservation depuis la découverte, acquérir les données numériques. « L’argent public est mobilisé pour protéger et transmettre. » Le travail du comité scientifique en fait partie. C’est la fameuse exception culturelle française… Le lien déjà fort entre l’État et le Département dans la vallée de la Vézère a permis d’envisager une médiation adaptée pour comprendre et valoriser la grotte de Cussac.
Ce patrimoine de l’humanité aux centaines de mètres de murs gravés a été qualifié de “Lascaux de la gravure” par Norbert Aujoulat, éminent préhistorien disparu trop tôt, en 2011.
Gravures et sépultures : une proximité unique au monde
Placée sous la responsabilité de l’État, la grotte est livrée à l’expertise des chercheurs, ils sont 70 à travailler sur ses mystères : bestiaire gravé (bisons, mammouths, rhinocéros, cervidés, oiseaux), motifs abstraits, représentations féminines, tracés digitaux, sépultures dans des bauges d’ours. La grotte gravettienne recèle aussi des concrétions et des stalactites excentriques. La présence simultanée de gravures et de vestiges humains est unique au monde, conservée en l’état du fait de l’effondrement du porche d’accès.
Jacques Jaubert*, qui dirige depuis 2009 le projet collectif de recherche pour l’étude de la grotte, passe un mois par an au Buisson. Pour lui, l’immensité et la beauté du site appelle à aller au-delà de cette première pierre. Le préhistorien devrait rapidement exhausser le vœu de Marie-Lise Marsat de le voir animer une conférence dans sa commune.
* Le tirage de l’ouvrage dont il a codirigé la publication aux éditions Confluences à l’occasion du 20e anniversaire de la découverte, Grotte de Cussac -30 000, est malheureusement épuisé.
Coproduction
Cette exposition permanente est le fruit d’un partenariat entre l’État, le Conseil départemental (maître d’ouvrage) et la commune du Buisson-de-Cadouin, sur la base des recherches scientifiques et conservatoires mises en œuvre dès la découverte. En libre accès, elle présente des archives et témoignages inédits, la visite suit le parcours emprunté par les chercheurs dans les deux branches de la cavité. Elle permet de comprendre les enjeux d’exploration et de protection.
Un film de 16 mn de Pascal Magontier retrace l’aventure de Cussac racontée par son inventeur, Marc Delluc, lors d’une visite effectuée en 2009.
• L’exposition est ouverte du mercredi au dimanche de 15h à 19h et le vendredi, jour de marché, de 10 à 12h. Visite gratuite.