Partant du principe que l’assainissement est un processus permettant de vivre dans un environnement sain, l’assainissement écologique va plus loin, s’inscrivant dans une logique de recyclage de la biomasse et des éléments nutritifs ainsi que du respect du cycle des matières.
Les filtres à broyat de bois (FBB)
Également nommée pédo-épuration, cette technique d’assainissement utilise des tranchées peu profondes remplies de broyat de bois pour infiltrer les eaux ménagères (ou grises) dans la couche superficielle des sols plantés. Ces eaux vont pour une partie être absorbées par les végétaux, pour l’autre rejoindre à terme les nappes d’eaux souterraines. Les matières organiques qui chargeaient les eaux grises vont se déposer dans le sol et y être consommées par la pédofaune et la pédoflore.
Bien évidemment, il est impératif de ne pas déverser de produits dangereux avec ce système mais quand on y pense, est-ce bien raisonnable de le faire avec un système conventionnel ? les FBB présentent un autre avantage de taille en plus de leur portée écologique : ils sont très peu onéreux, puisqu’il faut compter en moyenne 1 000 € de matériaux (en ce moment).
Le hic ? ce système n’est pour l’instant pas « conforme à la loi » mais le RAE y travaille, main dans la main avec les SPANC (Service public d’assainissement non collectif, organisme de contrôle) et surtout, l’association vient de réaliser une avancée unique en France en étant à l’origine d’un arrêté ministériel.
Se mouiller pour avancer
Depuis 2006, le RAE travaille en effet avec les acteurs publics (INRAE, ADEME, ministère…) et organismes privés de l’assainissement, pour la défense du droit universel d’accès à des installations sanitaires décentes. Comme le martèle Christophe Merotto, l’un des fondateurs de l’association et directeur de l’écocentre Pierre et Terre dans le Gers, « Il est possible de fonctionner différemment et c’est ce que nous prouvons aujourd’hui. »
Grâce à leurs démarches, l’arrêté du 30 mars 2023 pris par le Ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires, permet l’expérimentation des FBB pour les projets de moins de 20 équivalent-habitants. L’association, via ses structures membres ou formées par le RAE, propose d’accompagner les porteurs de projet, afin de les aider à réaliser un système répondant aux règles techniques définies dans l’arrêté. Si vous souhaitez vous lancer, c’est une magnifique opportunité.
Petites et grosses commissions
Le fonctionnement du réseau est depuis ses débuts le plus horizontal possible, avec une contribution libre et bénévole de tous ses membres. Plusieurs commissions sont à l’œuvre (agriculture, règlementation, précarité sanitaire, révolution culturelle, plaidoyer, etc.) : elles restituent leurs avancées lors de rencontres annuelles joliment dénommées « intestinales ».
Le RAE est une source inépuisable d’expériences, de publications et d’expérimentations, qu’il partage avec le plus grand nombre et au service des citoyens : c’est un engagement extraordinaire pour un domaine crucial dans les années à venir.
Myriam POUPARD
Lire également : Le 19 novembre, journée internationale des toilettes
Un congrès international
Le premier du genre, consacré à la transition vers un assainissement durable et la valorisation des nutriments, s’est achevé dimanche dernier à Zürich, quelques jours avant la dixième journée mondiale des toilettes (qui aura lieu dimanche 19 novembre).
Des scientifiques et des praticiens de sept pays européens ont échangé leurs expériences et les résultats de leurs recherches, sur les alternatives à la gestion actuelle des excréments humains. Compte-tenu de la sécheresse croissante dans de nombreuses régions, utiliser près d’un tiers de notre eau potable pour transporter les excréments et l’urine vers les stations d’épuration n’est plus durable. De plus, les excréments humains contiennent de grandes quantités d’azote et de phosphore – des nutriments précieux, utilisés comme engrais dans l’agriculture.
Près d’une centaine de personnes ont participé au congrès, et y ont présenté de nombreux projets. L’Institut national Suisse pour l’eau et l’assainissement (EAWAG) mène à Zürich, depuis près de trois décennies, des recherches sur la séparation de l’urine, qui permettrait de réduire de deux tiers la taille de nos stations d’épuration.
Des expériences prometteuses
Dans le nouveau quartier parisien de Saint-Vincent de Paul, 600 appartements sont désormais équipés de tuyaux à cet effet. « L’urine collectée sera utilisée comme engrais dans les espaces verts publics, a indiqué Louise Raguet, de l’École nationale des ponts et chaussées ». À Eberswalde, en Allemagne, une entreprise transforme les excréments humains, issus de toilettes sèches, en compost hygiénisé – une étude scientifique est en cours pour évaluer ses résultats.
La situation juridique actuelle entrave cependant encore, dans de nombreux cas, la propagation de telles approches.
Ivo Guilherme, du RAE, a néanmoins exprimé son enthousiasme : « Le mouvement de la transition vers un assainissement durable et la valorisation des nutriments est certes encore largement méconnu du public. Mais cela va changer car les problèmes augmentent. La situation est comparable à celle du mouvement pour les énergies renouvelables il y a 40 ans ».
Pour comprendre facilement les enjeux en 3 mn:
Fabien Esculier, coordinateur du programme de recherche Ocapi, porté par le LEESU (laboratoire eaux environnement et systèmes urbains), présente sa thèse intitulée « le système alimentation/excrétion des territoires urbains : régimes et transitions socio-écologiques » lors de la finale université paris-est 2019 du concours ma thèse en 180 secondes. [prix du public] #mt180