Le jury s’est montré sensible à la dimension et l’audace du projet de Sardy, une création qui s’inscrit dans la logique des fondateurs du Prix : redonner vie à des lieux existants, sensibiliser le public à la pérennité d’un patrimoine historique et végétal remarquable pour l’inscrire dans l’avenir.
Ces jardins, en surplomb de la vallée de la Dordogne, se déroulent autour d’une ancienne fortification médiévale, remaniée aux XVIIe et XVIIIe siècles en maison d’agrément dans le goût italien.
Acquise en 1956 par la famille Imbs, la propriété a été restaurée par l’éminent architecte et ami Louis Aublet. Il a recréé le cœur du jardin autour du bassin du XVIIIe siècle, donnant à l’ensemble un charme qui fait sa renommée. Depuis cinq ans, Ninon Imbs s’attache à adapter l’ancien parc au changement climatique.
Jardin sensoriel en devenir sur 3 hectares
Sa connaissance des jardins italiens et jardins secs la guide dans la création d’une longue perspective de 250 mètres, à l’ouest du jardin actuel, qui donnera une dimension nouvelle à ce jardin de référence en Aquitaine, labellisé Jardin remarquable depuis 2004.
« Cet aménagement, composé d’un bâtiment d’accueil aux airs d’orangerie, en cours de construction, commandera une succession de jardins et de bassins animés de fontaines, inspirés par les démarches du célèbre paysagiste espagnol Fernando Caruncho et du pépiniériste Olivier Filippi, spécialiste des plantes méditerranéennes de terrains secs.» Cette promenade poétique, imaginée comme un parcours spirituel, mettra les cinq sens en éveil. Les visiteurs chemineront à travers un jardin de senteurs, un jardin à l’italienne avec ses parterres d’eau, une oliveraie scindée par un ruban d’eau, ils longeront une pièce d’eau en demi-lune avant de retrouver le cœur historique des Jardins de Sardy. Avec ce prix, le projet bénéficie d’une dotation de 4000 euros.
Ces jardins, propriété de Frédéric et Ninon Imbs, s’épanouissent sur deux des 14 hectares du site et comptent un pigeonnier du XVIIe siècle, restauré avec la Fondation du Patrimoine (2023-2024). Ouverts du 1er mai au 30 septembre, les lieux accueillent des concerts, promenades musicales, lectures et conférences.
Coup de cœur pour le Colombier
À Paunat, « les jardins créés en 1988 par Bernard Hautefort viennent magnifier une chartreuse des XVIIe et XVIIIe siècles en soulignant les teintes ocre de la pierre de cette belle bâtisse aux volets bleus ». Le colombier du XVIIe siècle a donné son nom à cette propriété de 50 hectares avec prairies, cultures et bois. La passion du propriétaire a composé durant 30 ans, sur 2 ha, une symphonie de milliers de buis, camélias, myrtes, roses anciennes et iris répondant à l’environnement champêtre alentour. Les topiaires sont ponctués de surprises végétales avec bulbes et vivaces, insolents traits de couleur et graphismes particuliers.
D’espaces intimistes en larges ouvertures sur le paysage, de chambres végétales structurées en clé des champs, ces jardins continuent de grandir en suivant l’autre centre d’intérêt de leur créateur : la musique.
Un théâtre de verdure en projet
Le raffinement des décors en fait déjà un lieu propice à la célébration des arts. Le théâtre de verdure imaginé près du pavillon octogonal de crépi rose qui clôt sa plus longue perspective, s’intègrera au relief du jardin pour accueillir dans de meilleures conditions les représentations théâtrales et concerts de musique de chambre. Le jardin est par ailleurs ouvert au public du 13 avril au 30 octobre.
Sous le charme des lieux, le jury a décidé d’ajouter un nouveau prix à celui créé l’an passé, avec un “Coup de cœur” doté de 2000 euros.
Militants des jardins
La Nouvelle-Aquitaine compte environ 500 parcs et jardins, dont 360 ouvrent régulièrement leurs portes au public et 60 sont labellisés Jardin Remarquable. L’Association des parcs et jardins d’Aquitaine et la Fondation du patrimoine ont créé l’an passé le Prix du jardin patrimonial d’Aquitaine pour récompenser des projets de restauration ou d’extension en prenant en compte les aspects artistiques, créatifs, ou originaux de la composition pérenne d’un parc ou jardin. Le jury se prononce notamment sur la qualité d’un projet de restauration visant à rétablir l’état antérieur du jardin ou du parc.
L’an passé, pour la première édition, c’est le parc Latour-Marliac au Temple-sur-Lot (47) qui avait remporté cette distinction pour son projet de restauration des bassins de nymphéas.
• La Fondation du patrimoine, qui a pour mission depuis 1996 de sauvegarder, restaurer et valoriser des architectures élevées par des talents humains, souhaite contribuer la sauvegarde du patrimoine naturel : extension du label aux parcs & jardins, création de ce prix régional, collecte nationale Sauvons les forêts françaises, création d’un Conseil scientifique sur la transition écologique, publication d’une étude sur l’impact environnemental…
• L’Association des parcs et jardins d’Aquitaine, créée en 1992 par Véra de Commarque (Urval), met en valeur le patrimoine végétal et ses éléments remarquables (dynamique créative des parcs et jardins, protection, organisation de visites avec des experts…)
Le jury de ce concours
Le jury a visité cinq projets candidats : Patricia Bouchenot-Déchin, écrivain et jardinière (autrice de André Le Nôtre chez Fayard), a reçu le prix de l’Académie française ; Hubert de Cerval, vice-président l’association française pour l’art topiaire et le buis (EBTS France) ; Geoffroy de Longuemar, vice-président du Comité des parcs et jardins de France ; Gérald de Maleville, délégué régional de la Fondation du patrimoine ; Guiral de Raffin, président de l’Association des parcs et jardins d’Aquitaine ; Éric Sander, photographe des belles demeures et jardin (VMF, la Demeure Historique, la Fondation du patrimoine…)