C’est la recette des maisons en torchis, un habitat traditionnel (bien connu dans la Double !) très répandu avant que n’évoluent les techniques de construction, nos modes de vie et les moyens financiers dévolus à ce poste. Nous ne sommes cependant plus contraints d’être sur la paille pour l’utiliser comme matériau et l’on assiste même à son renouveau face aux défis écologiques à relever : on estime à 500 le nombre de nouvelles constructions en paille chaque année pour un total de 5 000 en France actuellement. En Dordogne, 22 sont recensées (140 en Nouvelle-Aquitaine), mais ces chiffres sont bien en deça de la réalité dans la mesure où il appartient aux propriétaires ou aux architectes de se signaler.
Feu de paille ou solution d’avenir ?
Le célèbre slogan “L’énergie est notre avenir, économisons-la” pose une réalité qui dépasse (et de loin) l’engagement écologique du fournisseur d’énergie en question. Celle qui concerne les matériaux de construction est l’énergie grise, soit la quantité d’énergie consommée lors de la production, l’extraction, la transformation, la fabrication, le transport, la mise en œuvre, l’entretien et le recyclage desdits matériaux. Non transformée, la botte de paille est l’isolant ayant la plus faible énergie grise.
La paille présente un bilan carbone négatif (c’est-à-dire qu’elle absorbe davantage de CO2 qu’elle n’en rejette) et c’est une ressource disponible localement : la plupart des approvisionnements d’un chantier se font dans un rayon de 50 km. 10 % de la paille de blé produite annuellement en France suffirait pour isoler tous les nouveaux bâtiments construits chaque année.
Son faible coût d’achat n’est pas la moindre de ses qualités mais il faut y apporter une nuance. C’est une technique de construction qui demande beaucoup de main d’œuvre : en autoconstruction et sous forme de chantier participatif, elle est idéale, mais si cette mission est confiée à un professionnel, son coût sera plus élevé qu’une construction avec des matériaux classiques. Ses excellentes propriétés isolantes atténueront les frais de chauffage et compenseront cet investissement de manière significative.
La construction paille s’est professionnalisée, elle est maintenant reconnue au même titre que les autres modèles proposés dans le bâtiment et bénéficie de garanties décennales propres à rassurer toute personne, entreprise ou collectivité tentée de se lancer dans l’aventure.
Une construction exemplaire : la maison Feuillette
La plus vieille maison en paille de France tire son nom de l’ingénieur Émile Feuillette : il l’a conçue en 1920 à Montargis, dans le Loiret, et a proposé ce modèle de bâtiment comme une alternative rapide et de faible coût pour assurer la reconstruction après la Première Guerre Mondiale. À la question de connaître l’entretien nécessaire pour assurer sa pérennité, le président du C.N.C.P. (Centre National de la Construction Paille, propriétaire des lieux depuis 2014), Mickey Leclercq, répond « la taille de la vigne vierge qui recouvre ses murs extérieurs, trois fois par an ! ». Nul besoin de refaire les enduits en plâtre sur les murs intérieurs ni ceux en chaux-sable à l’extérieur depuis 100 ans ! Même Jeanne Calment, du haut de ses 122 ans, aurait pu y séjourner durant toute sa vie d’adulte… Du fait du Covid, les festivités prévues pour son centenaire, l’an passé, auront lieu le week-end des 21 et 22 mai 2021. Et pour preuve de sa valeur, elle est inscrite au titre des Monuments Historiques depuis 2020.
Myriam Poupard et Marylin Bernet
À suivre : le témoignage de Julien